« Au hasard d’une cité idéale, d’une cité idéale au hasard » par Benjamin Fauré.

Le cinéma permet une approche sensible et artistique de l’espace. Plusieurs réalisateurs, dont Eric Rohmer, utilise les territoires dans lesquelles s’implantent leurs films comme une métaphore des relations humaines et des péripéties que vivent les personnages. De ce fait, ils proposent une analyse sur l’espace et la manière dont les acteurs l’habitent et le construisent. Dans l’Ami de mon amie, la mise en scène de la ville participe de la narration et des liens entre les protagonistes. Benjamin Fauré est l’auteur du site La Kinopithèque où l’on peut trouver d’autres analyses en lien avec la géographie, il contribue et coordonne également la revue Zoom Arrière.

Retour sur le film d’Eric Rohmer, L’ami de mon amie (1987).

Ici, Rohmer ne laisse rien au hasard. Tout est réfléchi, soigneusement mis en scène, classé, ordonné : L’ami de mon amie, sixième et dernier volet de la série des Comédies et Proverbes, porte jusque dans son titre à la symétrie contrariée, aux intentions à peine dissimulées, l’idée d’un assemblage quasi géométrique ou mathématique et d’une affinité secrète, non seulement entre les personnes devenue amies, mais également, compte tenu de la géographie du film, entre ces amis et l’espace qu’ils habitent. « C’est un peu ce qui m’a amené à tourner ce film : confronter la vie et l’architecture, les habitudes et l’urbanisme. Il y avait là un vrai sujet de fiction et un enjeu de mise en scène. »1 Éric Rohmer structure joliment son film (et le titre en est le reflet), mais dire qu’il écarte le hasard de sa réflexion serait toutefois mal le connaître.

L’ami de mon amie (1987).

De façon plus aboutie que dans ses précédents films, car plus précis, plus complet dans ses descriptions (me semble-t-il), L’ami de mon amie « assemble » tout d’abord et juxtapose les cheminements sentimentaux de ses personnages aux espaces traversés et parfaitement identifiés. Blanche, fonctionnaire, amoureuse qui n’a pas confiance en elle, sauf à la piscine, tombe sous le charme du bel Alexandre, ingénieur à EDF, toujours en costume et prêt à séduire (« mon champ d’action porte sur l’étendue de la mégapole parisienne »), il apprécie les relations directes et davantage celle qu’il entreprend avec Léa, étudiante en dernière année d’informatique, sûre d’elle, sauf à la piscine, qui recherche un copain plus en accord avec ses goûts que Fabien, véliplanchiste gentil, sincère et rêveur, comme Blanche. À ce rectangle de personnages (Emmanuelle Chaulet, François-Éric Gendron, Sophie Renoir, Éric Viellard), s’ajoute Adrienne (Anne-Laure Meury), future ex-copine (d’Alexandre), amie gênante (de Blanche), qui vient embarrasser de ses remarques les uns et les autres et qui perturbe plus qu’autre chose l’équilibre à trouver entre les quatre premiers (la première fois qu’on la voit, c’est à la piscine où elle est aussitôt poussée dans l’eau par l’un des quatre).

Le film se déroule dans une ville nouvelle de la région parisienne, Cergy-Pontoise.

Après Les nuits de la pleine lune et Marne-la-Vallée en 1984, Éric Rohmer choisit de faire vivre Blanche et ses amis à Cergy-Pontoise. Située à 35 km au nord-ouest de la capitale, la ville nouvelle est le théâtre de vie de toutes ces personnes. Avec d’autres villes (Évry, Sénart, Saint-Quentin-en-Yvelines et Marne-la-Vallée), Cergy-Pontoise avait été pensée pour participer au rééquilibrage urbain de l’Île-de-France et, l’idée ayant été mûrie par la DATAR, son chantier fut mis en œuvre en 1970. Quand Rohmer décida de tourner, un peu plus de quinze ans après, Cergy s’était développée et la commune avait eu le temps d’ajuster ses services aux demandes des populations nouvellement installées. Dans L’ami de mon amie, Blanche et ses amis disposent par conséquent de tout ce dont ils ont besoin, ce que précise bien Alexandre au bistrot quand Blanche lui pose la question :

« Vous vous plaisez à Cergy ?

– Oui, beaucoup. Avec les 15 chaînes de télé, les lacs, les tennis, bientôt le golf, les deux théâtres, on aurait du mal à s’ennuyer. »

Rohmer s’intéresse à de jeunes actifs. Les personnages qu’il invente ont entre vingt et trente ans, habitent et travaillent en ville. Ils sont célibataires ou en couple, mais n’ont pas d’enfant. Ils ne cherchent sur leur lieu de vie ni école, ni crèche, ni services de santé, mais seulement une facilité d’accès à leur lieu de travail, des commerces et des loisirs (pour l’anecdote, la piscine où Blanche donne un cours à Léa est la même que filme par Céline Sciamma trente ans plus tard dans Naissance des pieuvres). Alexandre ajoute : « Ici, je me sens bien plus intégré à l’immensité du Grand Paris que si j’habitais au fin fond du 1er arrondissement. ». Dans le cadre de son travail, Alexandre multiplie les allers-retours entre Paris et Cergy. Il dit passer beaucoup de temps dans les transports en commun, mais ce n’est pas le cas des filles avec qui il discute qui, elles, n’ont besoin de se rendre dans la capitale que plus occasionnellement. D’ailleurs, dans les seules scènes tournées en dehors de Cergy-Pontoise, un vernissage qu’Adrienne propose à Blanche, ainsi qu’un match de tennis à Roland Garros, Rohmer ne filme pas les temps de trajet et donne l’impression d’une quasi immédiateté entre la capitale et la ville nouvelle.

La préfecture du Val d’Oise apparait dès le début du film.

Particulièrement intéressé par la forme urbaine, le cinéaste, qui avait déjà consacré un documentaire à Cergy-Pontoise, Enfance d’une ville (1975), donne une image plutôt positive de ce grand projet d’aménagement et de ce qu’est devenue la ville. Les premiers plans du film sont des paysages du quartier dallé de Cergy-Préfecture. Le titre, « L’ami de mon amie », apparaît sur une vue du bâtiment le plus emblématique, la préfecture du Val-d’Oise, le premier construit de la ville nouvelle et qui a la forme d’une pyramide inversée (on le doit à Henry Bernard, l’architecte de la Maison de Radio France). Les allées et venues dans ce même quartier, ainsi que dans le quartier de la gare sont nombreuses : les quatre compagnons s’y rencontrent, parfois par hasard, entre les commerces et les cafés et le long de l’Axe Majeur qui se poursuit jusqu’au passage de l’horloge géante.

« Ça doit être triste de vivre ici toute seule. »

Ces espaces publics ont tout de la cité idéale telle qu’elle a été pensée à la Renaissance : axe principal, symétrie et harmonie des lieux, lumière… La forme est dictée par la raison et là, plusieurs centres permettent à ses habitants de se croiser et d’échanger. Le pouvoir départemental et le pouvoir municipal qui reviennent à la préfecture et à la mairie, où Blanche travaille, constituent d’ailleurs deux centres distincts (à une heure à pied l’un de l’autre). L’architecture moderne de la cité du Belvédère d’inspiration classique ramène également à la cité idéale. La place des Colonnes où se trouve le Belvédère a été dessiné par Ricardo Bofill. Je ne sais en revanche si les villes pensées par Alberti ou Serlio étaient automnes ou intégrées à un réseau urbain, mais Cergy, nous l’avons dit, sans être tout à fait une ville dortoir, dépend du pôle parisien qu’elle est censée alléger (en habitants et en concentration d’activités…).

Cependant, Rohmer ne fait pas non plus de Cergy une nouvelle Utopia. La grande esplanade du Belvédère traversée par Blanche, quand celle-ci rentre chez elle, paraît bien déserte. Les vues depuis son appartement sur des paysages vides (la place d’un côté) ou lointains (Paris et la Défense de l’autre), ainsi que la discussion entre Blanche et Léa (où pour la première fois elles parlent de leurs déceptions amoureuses et de leurs désaccords) laissent une impression d’insatisfaction. Les dialogues n’apportent pas vraiment de critique de la ville. Les amies s’interrogent brièvement sur le sentiment d’isolation qui naît à habiter seul au sein d’un quartier à peine occupé. Ce sont surtout les images du réalisateur qui donnent à voir la tristesse des lieux et la froideur des formes architecturales2. Pas d’espace vert ici, l’herbe n’a pas encore poussé. Éric Rohmer questionne bien l’échelle humaine de ces quartiers, mais il reste encore difficile de dire si le cinéaste est absolument convaincu par la ville nouvelle ou simplement fasciné par une architecture, certes impressionnante et fonctionnelle, mais au demeurant imparfaite.

Certaines scènes du film ont lieu dans des espaces plus verdoyants, en lien avec la relation qu’entretienne les personnages.

Pour avancer sur ce point, il nous faut poursuivre la description topographique que donne le film. En suivant le couple formé par Blanche et Fabien, il nous semble d’ailleurs déceler un parti pris. En effet, ces jeunes gens tombent amoureux à la périphérie de la ville. Tout d’abord, devenus amis, ils se retrouvent pour faire de la planche à voile sur les étangs de Neuville (le centre nautique date de 1980 mais depuis 2015 la commune a renommé la base de plein air, l’«Île de loisir de Cergy-Pontoise »). Plus Blanche et Fabien se rapprochent, moins les espaces qu’ils fréquentent sont bâtis et bétonnés. La promenade sur les bords de l’Oise est l’occasion de pointer un index sur les espaces identifiés autour de la rivière :

« C’est l’Oise, là-bas, qui se confond avec les arbres. Comme ça, elle tourne dans la petite cuvette, elle passe au pied de là où tu habites.

– Oui, on voit la tour du Belvédère.

– Elle continue, fait le tour en boucle devant Cergy-Préfecture, jusqu’au pied de la tour EDF. »

Cela rappelle Gaspard, dans Conte d’été (1996), qui fait le même geste et décrit le littoral de Dinard avec Margot. Dans L’Ami de mon amie, sur le chemin de hallage, Blanche et Fabien gagnent en intimité. Ils s’embrassent pour la première fois au parc, près des bois, où tout est vert. Le couple se forme ainsi en fréquentant des espaces moins gris et moins centraux. Sur les bords du lac ou près de l’Oise, on pense facilement aux bourgeois et aux ouvriers qui profitent du soleil en bord de Seine sur les toiles impressionnistes de Seurat ou de Renoir. La référence est sous-entendue dans un échange :

« En fait, c’est plutôt un voyage dans le temps que j’ai l’impression de faire. Tu sais, quand les ouvriers allaient pique-niquer au bord de la Seine ou de la Marne. Je pensais que ça n’existait plus.

– Pour la plupart ici, c’est pas des gens de Cergy. Ils viennent des banlieues moches, entassés les uns sur les autres, dans des HLM complètement délabrés. Pour eux ici, c’est un peu comme s’ils allaient au Palais de Versailles. Odeur pour odeur, j’aime mieux celle des merguez que celle de l’essence le dimanche après-midi dans un bouchon… »

Une opposition ville/nature se forme dans le film.

Rohmer associe Blanche et Fabien aux verts paysages alentours, plus « naturels » (malgré toute la fausseté du terme), ce qui pourrait correspondre aussi au tempérament des personnages, à la fois hésitants et tout aussi capables de spontanéité, à l’écoute de leur cœur sans être calculateur, peut-être plus verts en amour que l’autre couple du film. Léa et Alexandre, dont les cœurs ne se trouvent pas non plus de suite, sont plus aguerris dans ce domaine, davantage sûrs d’eux-mêmes en tout cas. À l’opposé de Blanche et Fabien, de leurs atermoiements et de leurs troubles sentimentaux, Léa et Alexandre sont plus « classiques », un peu « vieux jeu » comme le reconnaît Léa (« J’aime qu’on me prenne en charge. […] Quelqu’un de plus vieux me conviendrait mieux. »). Toutefois, ni Léa ni Alexandre n’hésitent quand l’occasion se présente. De plus, le couple se fixe des règles (le « pas avant six mois » notamment) et s’accorde en définitive assez bien à la régularité des lignes du décors urbain. Ils se donnent rendez-vous et se retrouvent au centre (quartier de la gare ou de la préfecture), emplacement qui convient aussi très bien à leur façon d’être, pas toujours discrète. Blanche et Fabien, eux, se trouvent par hasard. Il est l’ami de son amie qu’elle a rencontrée encore une fois par hasard dans un restaurant d’administration. Les occasions en entraînant de nouvelles, les voilà en train de s’embrasser dans l’herbe.

La nature des différents relations amoureuses du film trouve un écho dans les paysages qui entourent les personnages.

Le réalisateur des Métamorphoses du paysage (1964) semblait croire au confort des villes nouvelles, à leur développement et à leur réussite. Pourtant du double panorama qu’il donne, à la fois urbain et amoureux, dans L’ami de mon amie, il ressort une plus grande sympathie pour le couple des rives et donc, si l’on force un peu la prise de position, pour les marges les plus simples de la cité. Dans les herbes plutôt que sur les dalles ? Blanche et Fabien finissent par s’habiller de pulls et de tee-shirt verts après s’être embrassés en jaune et bleu (le jeu sur les couleurs dans le film, assez amusant, ne se limite pas à ces allusions). On pourra toujours arguer que les étangs et les sentiers sont des aménagements comme les autres et qu’ils ont été façonnés en même temps que les autres quartiers de Cergy, il n’en reste pas moins cette impression que Rohmer, après avoir beaucoup arpenté le sol en dur de la ville nouvelle, réserve au couple phare de son film un espace où la part de nature y est plus importante et possiblement avec elle la part du hasard.

Article écrit par Benjamin Fauré, mise en ligne par Léa Glacet

Notes:

  1. Éric Rohmer dans un entretien donné à Libération, 2002 (cité sur ce site personnel consacré au film :  http://lamidemonamie.free.fr/index.html)
  2. En 2013, à propos des villes nouvelles, l’historien Loïc Vadelorge parle d’architecture technocratique, de manque d’âme et de quartiers trop vite dégradé pour lesquels il a fallu, à Cergy-Pontoise et ailleurs, mettre en œuvre des chantiers de rénovation. Voir M.-D. Albert, « Les villes nouvelles ont-elles bien vieilli ? », dans L’Atlas des villes, Le Monde hors-série, p. 140-141. Voir aussi Loïc Vadelorge, Retour sur les villes nouvelles, une histoire urbaine du XXe siècle, Créaphis, 2013.

Dernières nouvelles de l’association ! Café géo, rencontre cartographique et FIG.

La période a été chargée en évènements géographiques ! Voici un petit tour des dernières activités de l’association:

– Notre premier café géo de la saison « Anthropocène et changement climatique », le 26 septembre, dont vous pouvez consulter le compte-rendu ici (rédigé par Aylin Elci, étudiante en journalisme).

– Notre participation au FIG (Festival International de Géographie) de Saint-Dié des Vosges.

– la participation d’un de nos adhérents au Rendez-vous média – cartographie de presse à la Bibliothèque Municipale de Lyon

Lisez l’article jusqu’à la fin, avec un petit aperçu de nos prochains évènements !

1/ Notre premier café géo de la saison: « Anthropocène et changement climatique » avec Pierre Thomas (ENS de Lyon) et Roger Goullier.

Roger Goullier et Pierre Thomas ont présenté leurs pensées et travaux sur l’Anthropocène et la cryosphère le 26 septembre dernier, puis ils ont débattu sur les causes et les conséquences du changement climatique. Retrouvez le compte-rendu de l’intervention sur notre site ici

2/ Notre participation au festival international de Saint-Dié-des-Vosges édition 2022.

Léa Glacet, Maxime Fichet et Guillaume Barral se sont rendus au FIG le 1er et 2 septembre dernier pour représenter la Géothèque et faire de la médiation scientifique auprès du jeune public. Les premiers, Léa et Maxime, ont tenu un stand au FIG Junior pour faire découvrir la cartographie sensible aux plus jeunes. Guillaume a quant à lui présenté ses travaux sur les jeux vidéo et la didactique de la géographie en menant des ateliers découverte et des conférences (vous pouvez retrouver le compte-rendu des conférences ici). Pour approfondir le sujet, découvrez son carnet de recherche Géopédie.

Atelier de cartographie sensible au FIG junior avec un géographe en herbe !
Atelier de découverte des liens entre jeux vidéo et perception de l’espace, avec les jeux Journey et Assassin’s Creed Origins.
Comment aborder l’espace dans les jeux vidéo ? Une question entre cohérence et pédagogie, discutée ici par Guillaume Barral et Eve Ben-Haim.

3/ La participation d’un de nos adhérents au Rendez-vous média – cartographie de presse.

Guillaume Barral a modéré une soirée sur la cartographie de presse, avec Dario Ingiusto du Monde, et Xemartin Laborde de L’Express. La soirée a été filmée, et est disponible sur le lien suivant.

Quelle place pour la cartographie dans la presse ? Echanges entre Dario Ingiusto, Xemartin Laborde, modération par Guillaume Barral.

4/ Nos prochains événements

A vos agendas !

-Nous organiserons le 16 janvier prochain une rencontre avec David Teurtrie autour de son livre sélectionné au Prix du Livre de Géographie pour les Lycéens, Etudiants, BTS Tourisme, et CPGE : Russie. Le retour de la puissance, au Périscope.

-Nous en sommes en pleine préparation d’un événement autour de la thèse récemment parue de Damien Petermann sur l’image de Lyon d’après les guides de voyage aux XIXe et XXe siècles (voir son carnet de recherches).

Article rédigé par Guillaume Barral pour le site Geothèque.org.

Mis en ligne par Léa Glacet.

« Anthropocène et changement climatique », compte-rendu du café géo du 26/09 avec Pierre Thomas et Roger Goullier.

Deux interventions sur le changement climatique ont lancé un débat auquel le public a pris part lors du premier «Café Géo» de la rentrée au Périscope.

Lundi 26 septembre, la Géothèque, une association pour la géographie, a organisé au Périscope de Lyon, une rencontre sur les effets du changement climatique, avec Pierre Thomas, professeur émérite de géologie de l’ENS de Lyon, et Roger Goullier, agrégé de géographie.
L’événement trimestriel «Café Géo» a réuni une vingtaine de personnes dont des étudiants, des habitués du bar, et des passionnés de géographie. Lors de la session, les débats ont fusé et le public a participé à la discussion.


Sandales chaussettes aux pieds et barbe blanche, Pierre Thomas prend la parole sur l‘Anthropocène, l’époque où «l’homme a foutu sa merde» et a déréglé notre écosystème. Pour lui, le changement climatique est dû à l’activité industrielle. « Les gens disent ‘on ne savait pas, on ne nous a rien dit« , imite le professeur avec une voix niaise, « mais on sait les effets du Co2 depuis l’époque où Jules Ferry a rendu l’école obligatoire. Il aurait dû mettre ça au programme!« .
Pour illustrer ses propos, l’enseignant cite la date des vendanges qui avance de plus en plus tôt dans l’année. Un décalage qui est identifiable grâce aux registres de paroisses viticoles.

Il multiplie ensuite les exemples du quotidien, comme la fonte des glaciers terrestres et la migration des insectes de régions chaudes, pour convaincre le public – même si ce-dernier semble déjà partager son avis. Sa conclusion est claire: «chaque fois que vous achetez des fraises en février, vous êtes complices de l’érosion de la biodiversité. Il n’y a pas que Bolsanaro!».
A l’issue de cette présentation, c’est l’autre intervenant, Roger Goullier, qui prend la parole sur le thème de la cryosphère, la glace sur la terre. Le géographe se base sur les annales d’explorateurs du 19e siècle, les récits des vikings, des images satellites et des carottages qui remontent à près de 400’000 ans.

«L’essentiel des glaciers terrestres qui ont causé la hausse des mers ont déjà fondu dans les 150 dernières années. Restent ceux du Groenland et de l’Antarctique, donc la vraie problématique, est de savoir si eux fondent», explique-t-il. D’après un rapport sur la cryosphère publié par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) en 2019, «l’élévation du niveau de la mer s’est accélérée en raison de l’augmentation des apports d’eau provenant des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique».
Le géographe n’est cependant pas du même avis. D’après ses observations, ces régions ont certes drastiquement fondu en 2012, mais depuis 2021, elles ont retrouvé leur masse. «Il n’y pas de fonte en Antarctique, ça n’existe pas, c’est un fantasme», déclare-t-il au public hébété. Pourtant les données qu’il affiche sur l’écran semblent démontrer le contraire, surtout pour la fonte d’été qui est de plus en plus dramatique. Dans le public, une voix agacée crie: «Il ne faut pas nous prendre pour des imbéciles!».
Le débat s’intensifie lorsque Roger Goullier admet qu’il pense que la terre pourrait refroidir malgré le Co2, chose qu’elle a fait à l’ère primaire, il y a plus de 250 millions d’années. Mais Pierre Thomas coupe court à cette théorie et insiste sur les faits: «elle ne l’a fait qu’une seule fois dans l’histoire!».
Durant la dernière partie de la soirée, le géographe fait face à des commentaires enflammés du public. «On peut être alarmiste, mais je reste sceptique, déclare-t-il finalement, car si la température refroidie, on aura l’air bien fin». Pierre Thomas réplique aussitôt: «et si la température double, on aura l’air de quoi?». Le dernier mot revient à Guillaume Barral, le co-président de la Géothèque, qui conclut en rigolant:
«on aura l’air con!».

Nos remerciements vont à Aylin Elci, étudiante en journalisme, qui a rédigé ce compte-rendu.

Mise en ligne par Léa Glacet.

Compte rendu de l’AG de l’association le 14 septembre 2022.

Le 14 septembre 2022 à Lyon s’est tenue l’AG de notre association, l’occasion pour les différents géothécaires de revenir sur les projets de l’année passée et de se projeter dans le futur.

Etaient présents à cette AG les membres suivants: Roland Coberlin, Jean-Benoit Bouron, Maxime Fichet, Guillaume Barral, Damien Petermann, Hélène Chauveau, Léa Glacet

1/ Rapport Moral 2021-2022.

L’année a été riche en projets pour l’association avec, entre autre, trois cafés géo organisés au Périscope:

-Un café géo « Ville et capitalisme » avec Mathieu Adam et Emeline Comby le 18 octobre 2021, avec le compte-rendu ici.

-Un café géo « l’Indonésie, carrefours et confins » avec Edouard de Bélizal et Rémy Madinier le lundi 17 janvier 2022.

-Une rencontre « La ville souterraine: entre patrimoine, usages contemporains et pistes d’avenir » avec l’OCRA Lyon et l’association Robin des villes le lundi 7 février 2022.

-Un café géo « D’une crise à l’autre, les évolutions des marchés immobiliers résidentiels, regards croisés France-USA » avec Renaud le Goix et Florence Nussbaum le 30 mai 2022.

A cela s’ajoute l’organisation d’un Mapathon en association avec l’association CartONG en octobre 2021, ainsi que la Nuit de la Géographie au Court-Circuit le 1er avril 2022.

Nous sommes aussi actifs sur les réseaux. Notre compte Instagram, débuté cette année, recensent 400 followers.

2/ Rapport financier.

A date du 14 septembre 2022, la trésorerie de l’association s’élève à environ 1000 euros. Cette année a été bénéficiaire, entre autre grâce à une augmentation des dons et des adhésions et la résiliation d’un contrat d’assurance onéreux.

Pour ce qui concerne les recettes:

-Le CFC (centre français de la copie) nous a versé 492€ en janvier pour paiement de copies de documents produits par nous.

-Environ 20 adhérents cette année, avec 141 euros d’adhésions et de dons.

Pour ce qui concerne les dépenses:

-Le pôle de dépense principal a bien sûr été la Nuit de la Géographie, avec le vol de 70 euros au cours de la soirée.

-Le passage du compte au crédit coop, qui est passé de gratuit à 2€ p/ mois.

3/ Projets à venir en 2022-2023.

Plusieurs pistes et projets sont mentionnés durant les délibérations:

Certains projets sont sur le point d’aboutir: on mentionne la participation de l’association au FIG le week-end du 30 septembre au 1er octobre avec une atelier de cartographie sensible, et l’arrivée prochaine d’un café géo le 26 septembre autour des thèmes « Anthropocène et changement climatique ».

Des pistes d’amélioration sont évoquées:

-Mettre plus en avant les cafés géo, notamment à travers des CR plus systématiques. Pour permettre à plus de personnes de venir, il est envisagé d’organiser des cafés géo le mercredi et le samedi.

-Animer le compte Instagram, avec des jeux, des photos d’évènements.

-Mettre en avant le site internet, qui est un peu moribond.

-Entretenir un lien plus étroit avec les adhérents de l’association: mettre à jour la liste des adhérents et proposer une newsletter régulière, avec des infos exclusives. La campagne d’adhésion doit aussi être plus fluide, avec notamment l’utilisation de QR code lors de nos évènements.

D’autres projets possibles dans l’année sont évoqués:

-Plusieurs cafés géo possibles: un autour du jeu-vidéo et de la géographie, un autre en lien avec la thèse de Damien Petermann… Un partenariat avec une libraire café de Bellecour « Raconte-moi la Terre » est envisagé.

-Une participation de la Géothèque au Festival PopSciences en mai 2023 à Villeurbanne, avec possibilité de balade urbaine avec l’Assemblée citoyenne de Villeurbanne.

-L’organisation de la prochaine Nuit de la géo: un retour est fait sur l’édition 2022. Si globalement le public était au rendez-vous, le choix du lieu (bar le Court-circuit dans Lyon 7e), ainsi que la météo n’ont pas joué en notre faveur. Plusieurs membres soulignent aussi une organisation lourde, avec un calendrier contraignant. Il est envisagé de limiter la Nuit de la géo pour l’édition 2023, avec éventuellement simplement un café géo au Périscope lors de la date européenne.

-Une journée terrain de l’association un samedi d’avril dans le Bugey, avec possiblement la visite de la centrale nucléaire et des curiosités géographiques alentour (stelles, maisons bulles, vignes).

4/ Election du nouveau bureau.

Après délibérations, sont élues à l’unanimité les personnes suivantes:

-Présidence: Léa Glacet

-Co-présidence: Guillaume Barral

-Secrétaire: Maxime Fichet

-Trésorier: Jean-Benoit Bouron

-Secrétaire adjoint: Damien Petermann

Compte-rendu réalisé par Hélène Chauveau et mis en ligne par Léa Glacet.