Une nouvelle carte tirée du Bouron-Georges1Jean-Benoît Bouron, Pierre-Marie Georges, Les territoires ruraux en France, Une géographie des ruralités contemporaines. Ellipses, 456 p., 2015, desservie dans l’ouvrage par la contrainte du noir et blanc. La version couleur conviendra aux professeurs désireux de vidéoprojeter l’image à leurs élèves ou étudiants. Nous ne reviendrons pas ici sur les formes spatiales que prend la périurbanisation à l’échelle de l’agglomération (notons simplement au passage le rôle des forêts domaniales pour ralentir le front d’urbanisation, et inversement le rôle facilitateur du RER D2C’est l’existence d’un direct Paris-Melun qui explique la distance-temps de 35 minutes seulement entre les deux gares alors que des gares plus proches sont à 40 ou 50 minutes de trajet). Cette carte vise à placer dans un contexte plus vaste quatre vignettes représentant la morphologie du bâti, qui sont pour leur part à l’échelle de la carte topographique. Les quatre exemples que nous avons choisi permettent de s’exercer à la lecture des formes du bâti sur les cartes à grande échelle à partir de cas très individualisés.
Dans le premier exemple, la commune de Champigny-sur-Marne est intégrée à l’agglomération depuis longtemps. Les pavillons Loucheur forment un type de bâti caractéristique de la première périurbanisation, liée davantage à la multiplication des trains de banlieue qu’à l’avènement de l’automobile, d’autant qu’il s’agit à l’origine d’un habitat populaire à une époque où l’automobile est peu diffusée hors de la bourgeoisie.
Les deux exemples suivant sont situés sur le « front pionnier » de la périurbanisation, à l’extrémité d’un doigt de gant : ils témoignent de la contradiction entre l’aboutissement de l’idéal de la maison individuelle pour les classes moyennes et aisées qui désertent les grands ensembles récemment construits. Le Parc de Lésigny est l’œuvre d’une forme de périurbanisation qui, par recherche de nature (proximité avec la forêt), a conduit à l’artificialisation de surfaces importantes. Les grands ensembles, comme ici à Évry, sont perçus à partir des années 1960 comme la solution à la vétusté des centres-villes pas encore gentrifiés, sont quittés par les classes les plus favorisés et se détériorent peu à peu dans la décennie qui suit jusqu’à la « crise des banlieues » qui éclate à Vaulx-en-Velin, près de Lyon, en 1979. Contrairement à une idée reçue, l’habitat des grands ensembles n’est pas plus dense que celui de l’habitat traditionnel. La hauteur des tours et des barres est compensée par des appartements plus grands que dans l’habitat ancien, et par l’abondance d’espaces verts (sur la carte IGN, des espaces « blancs » regroupant les cultures non-permanentes et les divers espaces non bâtis, comme les dalles des grands ensembles. Je ne saurais trop ici recommander le travail du photographe Laurent Kronental sur la beauté post-moderne des grands ensembles, et celui d’un autre photographe, Romain Ufarte, notamment sur les non-lieux, les espaces désertés et les interstices urbains et sub-urbains, ou hypo-urbains.
La dernière forme d’habitat concerne le bourg d’une commune rurale, plutôt lâche pour une commune du Bassin Parisien où l’habitat est généralement groupé. L’éloignement aux pôles d’emploi de l’agglomération parisienne, calculé en distance-temps, laisse cette commune rurale à l’écart du phénomène de périurbanisation, du moins en termes de morphologie du bâti (rien ne permet ici de savoir si la barre de 40 % d’actifs travaillant dans un pôle urbain, qui définit la commune périurbaine dans le zonage de l’Insee, est ici atteinte).
Notes
↩1 | Jean-Benoît Bouron, Pierre-Marie Georges, Les territoires ruraux en France, Une géographie des ruralités contemporaines. Ellipses, 456 p., 2015 |
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↩2 | C’est l’existence d’un direct Paris-Melun qui explique la distance-temps de 35 minutes seulement entre les deux gares alors que des gares plus proches sont à 40 ou 50 minutes de trajet |